.
.
.
.
.
.

Le concept Polymotu pour la production de semences de cocotier

Par R. Bourdeix, 2018

Des savoirs traditionnels polynésiens aux stratégies de conservation modernes
Le concept Polymotu consiste à utiliser l'isolement géographique de sites spéciaux pour la conservation et la reproduction de variétés individuelles de cocotiers, d'autres espèces végétales ou  même d'animaux. En combinant les pratiques polynésiennes ancestrales aux récents progrès réalisés dans les sciences sociales et biologiques, une stratégie rationnelle de conservation des ressources génétiques et des connaissances traditionnelles associées pourrait être mise en œuvre.
Les contraintes de la conservation du cocotier ex situ (dans des collections au champ classiques) sont expliquées ci-dessous. Le concept alternatif de conservation Polymotu est ensuite décrit dans une optique de gestion multifonctionnelle du paysage.
Dans les collections ex situ, les variétés et populations de cocotier sont conservés sous forme d'accessions, généralement plantées proches les unes des autres dans les mêmes champs. Chaque accession compte généralement entre 75 et 100 cocotiers du même cultivar. Pour la reproduction des accessions dans des banques de gènes ex situ, la technique de pollinisation contrôlée avec ensachage de l'inflorescence est utilisée (Konan et al. 2008). Pour les cocotiers, cette technique est très coûteuse. Cela nécessite un laboratoire bien équipé, des techniciens bien formés, capables de faire l'ascension des palmiers et une main-d'œuvre considérable. Toutes les banques de gènes ne peuvent pas se permettre cela.
La durée de vie de telles accessions n’est que de 25 à 30 ans. Après cette période, la plupart des variétés de noix de coco non naines atteignent 15 m de haut ou plus. A ce stade, il devient difficile de grimper les palmes. Il est donc nécessaire de rajeunir les accessions avant que les inflorescences ne deviennent inaccessibles. Dans la banque de gènes africaine de Côte d'Ivoire, les travailleurs utilisent des triples échelles coûteuses pouvant atteindre une hauteur de seulement 14 mètres. Dans de nombreux autres endroits, les palmiers sont principalement montés manuellement, ce qui est risqué. Les programmes de rajeunissement nécessitent l'ascension d'environ 75 paumes chacune environ 15 à 20 fois. La production des 200 graines demandées pour la duplication de la seule accession exigera une préparation d'un an et demi; et cela coûtera plus de 1 600 USD dans un contexte de bas salaires en Côte d'Ivoire. Seuls les scientifiques disposant de budgets de recherche sains peuvent se permettre de commander des variétés de banques de gènes classiques de la noix de coco ex situ. Presque tous les agriculteurs ne peuvent pas se permettre cela.

Alternativement, les cocotiers peuvent être plantés en isolement géographique et reproductif, comme les anciens polynésiens l'on fait dans les conservatoires traditionnels situés à Tonga et aux Îles Salomon. Par exemple, lorsqu'une petite île isolée est plantée avec une seule variété de cocotier, la reproduction n'a lieu qu'au sein de cette variété et des graines certifiées sont produites naturellement pour les agriculteurs. 
De cette façon, les contraintes liées aux hauteurs et aux âges des paumes sont supprimées. Au lieu de grimper dans les palmiers pour effectuer une pollinisation contrôlée, il suffit d'attendre que la noix de coco tombe naturellement au sol. La pollinisation ouverte fournira des graines conformes au type et bon marché. Ainsi, la même accession peut être conservée tant qu'un nombre suffisant de palmiers reste en vie sur le terrain. Dans la plupart des cas, la durée d'une accession à la noix de coco sera ensuite étendue à 75 à 100 ans. Même si certains des paumes meurent, il n’est pas nécessaire de supprimer le reste, comme dans une banque de gènes classique. Les paumes mortes peuvent être remplacées par de nouvelles, sans enlever les paumes anciennes restées en vie. L'extension de la durée de vie d'une accession à la noix de coco de 25-30 ans à 75-100 ans représente une économie considérable de temps, de main-d'œuvre et d'argent.
La pratique polynésienne utilisée par le conservatoire traditionnel consiste à ne planter qu'une seule variété de noix de coco sur chaque petite île. Cette pratique a servi de base à la définition d'un nouveau concept de conservation appelé Polymotu. Vous trouverez de nombreuses informations sur ce concept et sa mise en oeuvre sur le site Webdu concept Polymotu . Comparé au modèle polynésien initial, le concept Polymotu a évolué de plusieurs manières (Bourdeix et al. 2012b):
Les sites ont été étendus à n’importe quel endroit où l’isolement reproductif peut être obtenu; Il peut s’agir d’îles, mais aussi de petites vallées isolées, de villes ou d’aménagements intérieurs dotés de barrières à pollen constituées de cocotiers ou d’autres espèces d’arbres, qu’ils soient sauvages (forêt) ou cultivés (caoutchouc, palmier à huile, etc.).

Représentation de l'île de Nuusafe’e
Aménagée avec trois variétés
de cocotier
Les espèces conservées peuvent être le cocotier, ainsi que d’autres espèces de plantes ou même d’animaux; En Polynésie, il est envisagé de conserver des variétés de kofai (Sesbania coccinea subsp. Atollensis) et de crabe des cocotiers (Birgus latro) sur les mêmes îles que les cocotiers pour une économie d’échelle.
Il est recommandé de planter jusqu'à trois variétés de noix de coco sur le même site et d'identifier les différents types de plantules à l'aide de marqueurs phénotypiques au stade de la pépinière. Ainsi à Samoa, une variété verte de cocotier Grand et deux Nains Rouges ont été plantés ensemble afin de conserver les grands et les nains et de produire des semences d'hybrides de Nains et de Grands pour les agriculteurs.
Les programmes de conservation (des aires protégées et des ressources phytogénétiques) évoluent souvent de la même manière, en commençant par porter attention portée à une seule espèce et en élargissant à des stratégies écosystémiques impliquant la participation des populations locales (Orlove et al, 2010).

Dr Bourdeix, Dr Valerie Saena Tuia and Alofa Leuluaialii sur l'île de Nuusafe’e à Samoa
Discutant l'aménagement de l'île selon le concept Polymotu
Références
Peterson, N. D., Broad, K., Orlove, B., Roncoli, C., Taddei, R., & Velez, M. A. (2010). Participatory processes and climate forecast use: Socio-cultural context, discussion, and consensus. Climate and Development, 2(1), 14-29.
Bourdeix, R., Johnson, V., Tuia, S., Kapé, J., & Planes, S. (2013). Traditional conservation areas of coconut varieties and associated knowledge in Polynesian islands (South Pacific Ocean).

Recommandations du réseau COGENT sur le matériel de plantation

Créé en 1992, le Réseau International des Ressources Génétiques du Cocotier (COGENT) vise à renforcer la collaboration internationale en matière de conservation et d'utilisation des ressources génétiques du cocotier; à promouvoir l'amélioration durable de la production du cocotier et à renforcer les moyens de subsistance et les revenus des acteurs de la filière dans les pays en développement. Du 8 au 10 juillet 2012, COGENT a organisé sa 16ème réunion du comité de pilotage à Cochin, en Inde. Le Comité Directeur et les représentants de la filière cocotier participant à la réunion ont adopté la recommandation internationale suivante.

Considérant que:

Malgré l'énorme potentiel de cette culture, les producteurs de cocotier ont souvent des revenus insuffisants, parfois sous le seuil de pauvreté. Environ 96% des 10 millions d'agriculteurs, qui cultivent le cocotier sur 12 millions d'hectares dans le monde, sont des petits exploitants dont la superficie de plantation est inférieure à quatre hectares. 
L'industrie est confrontée à un renouveau important et à une diversification des produits du cocotier. À l’avenir, certaines variétés traditionnelles en voie de disparition pourraient être vitales pour développer de nouveaux produits et marchés et pour améliorer les moyens de subsistance des agriculteurs. 
Les connaissances techniques des agriculteurs concernant le système de reproduction des cocotiers et l'utilisation de marqueurs génétiques, tels que la couleur des germes en pépinière, constituent un facteur clé pour la sélection. 
Les connaissances traditionnelles et techniques des agriculteurs et des autres acteurs de la filière sur la sélection du cocotier et son système de reproduction ne sont pas suffisamment évaluées au niveau mondial. Mais ces connaissances techniques doivent certainement être améliorées. Par exemple, en Polynésie Française, au moins 80% des agriculteurs ne savent pas que chaque cocotier produit à la fois des fleurs femelles et des fleurs mâles. 
Les agriculteurs et les agricultrices, les entreprises privées, les membres d'ONG et les organisations à base communautaire peuvent facilement être formés à produire de façon autonome du bon matériel de plantation.

COGENT recommande que: 

  • Les décideurs aux niveaux local, national et international, adoptent des portefeuilles efficaces de stratégies et de directives pour la conservation et l'utilisation durable des ressources génétiques du cocotier. Ceci répondra aux besoins des acteurs de la filière, hommes et femmes, en particulier pour garantir à la fois la conservation variétale et une disponibilité effective d'un bon matériel végétal pour la replantation. 
  • Les Services nationaux de l'agriculture et les sélectionneurs laissent aux agriculteurs un rôle primordial dans le choix des variétés qu'ils cultivent; et envisagent de déconseiller aux agriculteurs de cultiver une seule variété de cocotier, qu'elle soit de type Grand, Hybride, Nain ou autre. 
  • Au niveau national, les producteurs de semences et les services agricoles devraient fournir aux agriculteurs une gamme d’au moins six variétés différentes de cocotiers, y compris les variétés Grands, hybrides, Nains et, éventuellement, composites; et ces services devraient expliquer aux agriculteurs la spécificité de chaque variété en matière d'adaptation environnementale et de pratiques culturales. La plupart des agriculteurs choisiront de planter plus d'une variété. 
  • Les acteurs locaux (agriculteurs et agricultrices, entreprises privées, ONG et OC) devraient participer davantage à la fourniture de matériel génétique de qualité. Les agriculteurs et autres acteurs peuvent apprendre comment produire de manière autonome des semences de qualité, de type hybrides ou autre, en utilisant le concept Polymotu ou toute autre méthode adaptée. 
  • Il est important d'évaluer les connaissances des agriculteurs concernant la biologie de la reproduction du cocotier et l'utilisation de marqueurs génétiques tels que la couleur des germes, qui servent à la sélection en pépinière.
  • Enfin, COGENT recommande de développer une stratégie de communication afin d'accroître les connaissances des agriculteurs en matière de biologie de la reproduction du cocotier et de méthodes de sélection. Cette stratégie devrait être basée sur des outils de formation, des films didactiques, des communications médiatiques et une approche de commercialisation des ressources génétiques du cocotier.

Comment produire des Grands, des Nains et des Hybrides, dans la même plantation!

Par R. Bourdeix, L. Perera, RL Rivera, V. Saena-Tuia et L. Masumbuko 

La troisième recommandation adoptée lors de la réunion du comité directeur du réseau COGENT en 2012 était d'encourager les acteurs de la filière (agriculteurs et agricultrices, entreprises privées, ONG et Organisations professionnelles) à s'impliquer davantage dans la fourniture de matériel de plantation de qualité et d'enseigner aux agriculteurs et aux autres parties prenantes comment produire de manière autonome. des semis de qualité d'hybrides et d'autres variétés, utilisant le concept Polymotu ou toute autre méthode adoptée (Bourdeix et Allou, 2012a).
Bien que certaines initiatives récentes aient été lancées, il convient de souligner et de promouvoir davantage le lien entre la production de matériel de plantation et la conservation in situ des variétés. Dans le cas du cocotier, les politiques en matière de production de semences peuvent être classées en quatre catégories:
  1. Monopole: toutes les semences de cocotier disponibles sont officiellement vendues ou données par l’institution nationale responsable; d’autres échanges de semences se produisent bien sûr entre agriculteurs, mais ils sont considérés comme faisant partie du système traditionnel et informel sans aucun lien avec les institutions de Recherche et Développement (R&D). Une telle situation existait, du moins jusqu'à récemment, au Vanuatu et en Côte d'Ivoire.
  2. Conception centralisée: comme c'est le cas au Sri Lanka, une partie importante des semences est collectée auprès des agriculteurs, puis certifiée par l'institution nationale et diffusée à d'autres agriculteurs.
  3. Conception mi-centralisée: les graines sont également produites et vendues par les agriculteurs, mais ces derniers bénéficient des conseils et de la certification des institutions nationales.
  4. Conception privée: les semences sont produites par des acteurs privés de la filière sans aucun lien avec les institutions nationales de R&D.
Nous pensons que les options 2 et 3, dans lesquelles les agriculteurs, les chercheurs et les autres parties prenantes interagissent, sont les plus efficaces en termes de conservation et d'utilisation de la diversité génétique. On peut enseigner aux agriculteurs comment produire dans leurs champs des variétés traditionnelles et des hybrides modernes. La plupart des variétés traditionnelles de Grand sont généralement de couleurs variées, produisant notamment des fruits verts et bruns. Nous supposons que, dans une telle population, un cocotier aux fruits verts croisé avec un autre cocotier aux fruits verts donne toujours une descendance au fruits verts. Les figures ci-dessous illustrent une méthode possible pour transformer une partie du champ d'un agriculteur en un tel jardin de semences en utilisant à la fois des marqueurs génétiques de couleur et les spécificités du paysage fournissant des zones tampons servant de barrières polliniques.

Les différentes étapes sont les suivantes:

1) Au début, le champ est planté de cocotiers bruns, verts-bruns et verts issus d'une variété de grand traditionnelle. 

2) Couper tous les cocotiers bruns et et vert-brun et ne garder que ceux de couleur verte. 



3) Planter une variété de cocotier Nain Rouge et des cocotiers verts pour remplacer les cocotiers supprimés. Commencer à collecter des données sur les anciens cocotiers verts restants, en réalisant des analyses de fruits si possible pendant environ deux ans.

4) Deux ans plus tard, lorsque les premiers nains seront proches de la floraison, et en fonction du résultat des analyses de fruits, supprimer au moins la moitié des Grands de couleur verte et ne gardez que les meilleurs, ceux produisant de nombreux fruits à la bourre mince et à l'amande épaisse. 

5) Planter à nouveau des nains rouges et/ou une sélection de Grand verts dans les espaces disponibles. 


Les étapes 1 et 2 peuvent être réalisées successivement ou de manière plus progressive: pour des raisons économiques, il pourrait être envisagé de planter d'abord les nains sous les Grands existants, et d'éliminer les Grands bruns et vert-brun un ou deux ans seulement. plus tard, lorsque le nain sera proche de la floraison. 

Cette conception a été  d'abord imaginée en utilisant comme parent le Nain Rouge Malais, une variété fortement autogame. Pour produire des semences hybrides, cette variété naine doit être émasculée. D'autres variétés de nain rouge pourraient également être utilisées à la place de celui originaire de Malaisie. Certaines variétés intéressantes sont les Nains Rouges Compact récemment découvert en Polynésie française et à Fidji. En utilisant certain de ces nains (plus allogames), on peut espérer qu’il produiront au moins 50% de semences hybrides sans faire d’émasculation; une telle économie de main-d'œuvre pourrait permettre de réduire fortement le coût des semences hybrides de cocotier. Les semences germées de Nain Rouge et de Grand Vert seront aussi proposées aux agriculteurs et aux jardiniers.

Références
R. Bourdeix, L. Perera, RL Rivera, V. Saena-Tuia et L. Masumbuko. 2016. Communautés mondiales du cocotier: statut et stratégies de gestion et d'utilisation de la diversité in situ. Communication au troisième symposium international sur la recherche et le développement du Cocotier, CPCRI (Institut Central de Recherche sur les Cultures de Plantation), Kasaragod, 10-12 décembre 2016.

Recommandations de l'atelier CIDP sur la production et les semences de cocotier

Par R. Bourdeix, N. Hussein et D. Dore, 2019


Dans le cadre du projet CIDP, une formation sur la filière cocotier, la production et les systèmes semenciers a été organisée du 17 au 20 avril 2018 à Nadi, au Fidji. Trente participants de quinze pays et territoires de la région du Pacifique ont participé à cette réunion. Ils comprenaient des fonctionnaires des Ministères de l'agriculture, des membres d'ONG, des chercheurs et des membres du personnel de la Communauté du Pacifique Sud et du Cirad, ainsi que des dirigeants d'exploitations agricoles et de sociétés privées des pays et territoires suivants: îles Cook, Fidji, États fédérés de Micronésie, îles Kiribati, Îles Marshall, Nauru, Palaos, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Samoa, Salomon, Tonga, Tuvalu, Vanuatu, Polynésie Française et Hawaï. Tous les participants ont approuvé 24 recommandations régionales, techniques et stratégiques.

Matériel de plantation et système de production de semences

La situation dans les pays du Pacifique en ce qui concerne le matériel de plantation est très variable. Cela va des situations où 1) aucun plant n'est fourni aux agriculteurs par une institution; 2) les semences sont fournies gratuitement aux agriculteurs avec ou sans incitation financière à la replantation, 3) des semences hybrides Nain x Grand cultivées sont importées d'Inde aux îles Salomon à 10 USD par unité, à 4) la vente de plants de nains à 100 USD par unité (Hawaï). Tenant compte à la fois des disparités et des points communs entre ces situations, le groupe a convenu des recommandations suivantes.
1. Les Services Nationaux de l'Agriculture devraient laisser aux agriculteurs un rôle primordial dans le choix des variétés, et envisager de déconseiller aux agriculteurs de cultiver une seule variété de cocotier, (qu'elle soit de type Grand, Nain, Hybride ou autre). Au niveau national, les services agricoles et les autres acteurs de la filière devraient proposer aux agriculteurs une gamme d'au moins six variétés différentes de cocotiers, comprenant des types Grand, Nain, Compact ou Super Nain, Hybride et éventuellement des variétés composites; il devraient expliquer aux agriculteurs la spécificité de chaque variété en ce qui concerne l'adaptation à l'environnement et les pratiques culturales recommandées. Pour réduire les risques globaux, les agriculteurs devraient être encouragés à planter plus d’une variété. Les acteurs de la filière cocotier (agriculteurs et agricultrices, entreprises privées, ONG) devraient être encouragées à s'impliquer davantage dans la fourniture de matériel génétique de qualité . Les agriculteurs et les autres acteurs de la filière pourraient apprendre à produire de manière autonome des plants d'hybrides et d'autres variétés de qualité , en utilisant le concept Polymotu ou toute autre méthode appropriée.
2. Afin de mieux évaluer et de renforcer la filière cocotier, le groupe recommande aux services agricoles de créer et / ou de renforcer les bases de données nationales des producteurs de cocotiers et de créer des bases de données bien documentées sur la cocoteraie à l’aide de la méthode et des formulaires de saisie récemment développées par R. Bourdeix. V. Kumar et V. Mataora. Ces bases de données doivent être conçues et mises en œuvre de manière à être reliées aux autres bases nationales de données concernant les agriculteurs. Elles devraient également s'intégrer aux systèmes d'information géographique déjà existant.
3. L’atelier a noté que rien ne peut remplacer des programmes de sélection bien conçus, réguliers et durables menés par des professionnels bien formés. Une expertise est nécessaire pour évaluer les programmes de sélection de cocotier actuellement en place dans la région du Pacifique; aider au développement des compétences locales; créer de nouveaux programmes et faciliter la collaboration internationale entre ces programmes. La CPS pourrait jouer un rôle crucial dans le processus en assurant des échanges de matériel génétique et des transferts de compétences entre les pays et les territoires concernés.
4. La suggestion d'organiser des concours de variétés de cocotiers devrait être encouragée aux niveaux local, national et régional, afin de sensibiliser davantage les agriculteurs et le public à la diversité existant dans les pays et dans la région. De tels concours pourraient être intégrés aux événements culturels annuels organisés dans la plupart des pays et territoires insulaires océaniens (comme le festival Aloha à Hawaii, le festival de Festival de Teuila à Samoa, ou le Heiva de Polynésie Française).
5. Le nouveau concept de collection délocalisée de cocotier à base communautaire, utilisant les espaces publics, sera testé aux Îles Cook en tant qu'activité financée par le CIDP et devrait être étendu à d'autres pays et territoires.
6. Le Vanuatu et son Centre Technique de Recherche Agricole (VARTC) pourrait jouer un rôle moteur en tant que centre de formation pour les activités techniques liées à la reproduction du cocotier (fécondation artificielle avec ensachage, production de semences) et à la conservation du matériel génétique (collection ex situ).

Gestion agronomique et environnementale des plantations de cocotier

7. L’atelier a souligné l' importance des cultures intercalaires avec diverses espèces déjà utilisées par les agriculteurs, telles que le café, le kava, le cacao, la banane, le noni, l'ananas, les cultures fruitières et des légumes pour la sécurité alimentaire. Les Ministères de l'Agriculture et d'autres acteurs de la filière peuvent fournir des recommandations spécifiques et adaptées aux situations locales en ce qui concerne les meilleures espèces à cultiver en association avec le cocotier.
8. L’atelier préconise des recherches sur le maintien et l’amélioration de la fertilité des sols, les plantes de couverture et la microbiologie en utilisant des processus naturels favorisant des niveaux élevés de biodiversité microbienne.
9. Replantez les jeunes cocotiers sous les vieux cocotiers et ne retirez les vieux que lorsque les jeunes commencent à fructifier. (Note de R. Bourdeix, Décembre 2019 : attention il semble que cela ne soit pas toujours adapté, notamment dans le cas de sols pauvres coralliens)
10. Lors de la réhabilitation d'anciennes cocoteraies sans replantation, l'application d'engrais n'est généralement pas rentable. La dégradation des racines de la reprise forestière suffira à nourrir les cocotiers pendant quelques années.
11. Les agriculteurs et les scientifiques devraient continuer à tester les nouveaux dispositifs de plantation en groupe des cocotiers, car ces systèmes pourraient améliorer les conditions économiques des cultures intercalaires et la résistance aux cyclones des cocotiers.

Gestion biologique des plantations.

Actuellement, de nombreux sous-produits de la culture du cocotier sont utilisés pour la culture biologique d'autres cultures, mais pas pour la culture des cocotiers. Dans la plupart des îles du Pacifique, les noix de coco contribuent à l'alimentation du poulet et des porcs biologiques. Le groupe a formulé les recommandations suivantes:
12. L’atelier reconnaît l’ importance cruciale de la culture biologique du cocotier pour la région du Pacifique, à la fois pour des raisons environnementales et commerciales. Les semences devraient provenir d’origine certifiée biologique et être conformes à la norme biologique du Pacifique et/ou aux autres normes en vigueur. Les politiques élaborées à Vanuatu, aux Îles Fidji, aux Îles Salomon et au Samoa favoriseront la croissance de l’industrie biologique du cocotier. A noter cependant qu’en cas de culture pure (sans association), des semences non biologiques et des engrais peuvent être utilisés de façon raisonnable à la plantation, qui redeviendra biologique dans un délai de deux à trois ans si aucun engrais inorganique n’est appliqué dans l'intervalle.
13. L’atelier reconnaît que les cocotiers sont largement utilisés pour la culture biologique d'autres cultures et l'élevage biologique de porcs et de poulets. Ainsi, les agriculteurs peuvent tirer profit de la culture du cocotier en utilisant ses sous-produits organiques pour leurs propres autres cultures et/ou en vendant ces sous-produits pour la préparation d’engrais organiques et de substrats.
14. Encourager et renforcer l'utilisation de plantes de couverture fixant l'azote telles que Pueraria , Mucuna ou d'autres espèces adaptées aux conditions de l'atoll (par exemple, Vigna marina ), car elles améliorent les sols et réduisent le travail de désherbage. Dans la mesure du possible, il faudrait vulgariser la technique de multiplication par boutures actuellement utilisée aux Îles Salomon, plutôt que la multiplication par semences,
15. Au stade de la pépinière et de la plantation , il faut encourager l'utilisation d'engrais organiques pour la culture du cocotier. Pour la plantation en sac plastique, des bourres, du fumier et du biochar ou du charbon de bois peuvent être ajoutés dans le sac lors de son remplissage avec de la terre. Lors de la plantation de plants à racines nues, les bourres de noix de coco, les feuilles sèches et vertes, le fumier et le biochar/charbon peuvent être placés dans le trou de plantation. Les amendements dépendent de la nature des sols. Les sols des atolls nécessitent une attention particulière en ce qui concerne les oligoéléments (tels que le fer). L'inversion des horizons A et B peut présenter un avantage, de sorte qu'un sol plus fertile soit immédiatement disponible pour les racines émergentes.
16. Les bourres (enveloppe) des noix de coco sont riches en potassium et retiennent l'humidité. Les feuilles des cocotiers constituent un bon couvre-sol protecteur. Au lieu de les utiliser pour le compost, il est préférable d'entourer la base du cocotier d'une première couche de bourres de coco, disposées face ouverte ver le sol, et d'une seconde couche de feuilles de cocotier; Cela permettra à la fois de nourrir les palmiers et de réduire l'érosion et la croissance des mauvaises herbes.
17. Étudier la possibilité de préparer du paillis ou de l’engrais à partir des vieux troncs de noix de coco en utilisant des espaces clos dans lesquels les scarabées Oryctes peuvent entrer mais ne peuvent pas sortir et nourrir le poulet et les jeunes porcs avec le scarabée et ses larves.

Ravageurs et maladies

18. Renforcer la communication entre les experts et les groupes travaillant sur les semences et ceux travaillant sur les parasites et les maladies du cocotier. Le matériel de sensibilisation du public et les actions en matière de lutte contre les parasites et les maladies devraient inclure un volet sur la sélection du matériel de plantation, la gestion des pépinières et la plantation, et des moyens d’évaluer l’efficacité des actions menées (études avant/après).
19. Étudier les moyens de tirer profit de l'énorme quantité de larves d'Oryctes et d'adultes actuellement récoltés dans certains pays (jusqu'à 15 tonnes par mois dans certaines plantations de palmiers à huile).
20. Des travaux supplémentaires devraient être entrepris pour rechercher des moyens de valoriser l’abattage des vieux cocotiers , ce qui facilitera le financement de l'établissement de nouvelles plantations. Des opportunités existent dans des domaines tels que l’utilisation directe du bois de cocotier, la confection de placage à partir de ce bois, la commercialisation des cœurs de cocotier et la conversion des troncs en biocharbon. Des efforts supplémentaires sont nécessaires pour la mise en œuvre pratique de ces approches. Des recherches supplémentaires sont également nécessaires pour identifier des produits biologiques abordables, non toxiques pour lm’homme mais pouvant être utilisés pour l’injection dans les troncs afin : 1) de prévenir la prolifération d’Oryctes dans le tronc; 2) de tuer le cocotier, et 3) de préserver et traiter son bois pour une utilisation future.
21. Des recommandations devraient être développées et publiées à propos de l'élimination des cocotiers abattus et des autres déchets de bois, qui constituent sites de reproduction possibles pour les Oryctes.
22. La destruction des cocotiers par les coléoptères peut avoir un impact important sur le tourisme, comme c’est le cas par exemple aux Îles Salomon, à Guam et en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Davantage d’études sur la tolérance des diverses variétés de cocotier à l’insecte, le rôle d’une nutrition adéquate des plantes et d’autres facteurs tels que la phyto-assainissement font partie de la solution à développer. Comme il est plus facile de gérer des cocotiers de petite taille que des cocotiers haut d’une quinzaine de mètre dans la lutte contre Oryctes, les nombreuses variétés de nains Compacts et leurs hybrides avec des variétés locales doivent être testés et diffusés, en complément des variétés locales de Grand. L'atelier soutient également les priorités de haut niveau qui ont été développées lors de la réunion des Chefs des Services de l'Agriculture et des Forêts qui s’est déroulée au Vanuatu en 2017.
23. Le matériel de sensibilisation à la biosécurité devrait inclure des conseils à tous les pays membres sur les activités entreprises dans les pays où la nouvelle souche de coléoptère est déjà présente. La biosécurité du transport maritime entre les îles est essentielle, et concerne aussi, par exemple, les agriculteurs et jardiniers locaux transportant du compost ou du matériel végétal entre les îles.

Recommandation de nature stratégique

24. Compte tenu des risques émergents pour l'industrie du cocotier et de la nécessité de replanter à grande échelle, l’atelier recommande que davantage de ressources dédiées soient consacrées au système semencier du cocotier et à la gestion des plantations. Dans les petits États et territoires insulaires, au moins un agent de recherche et un agent de vulgarisation devraient se consacrer exclusivement et à temps complet au cocotier. Les plus grands pays et territoires devraient envisager la création d'unités distinctes travaillant au sein de leurs ministères avec une équipe entièrement dédiée au cocotier.

Citation en Français: Bourdeix, R., Hussein N. et Dore, D. (2019) Recommandations techniques de la réunion du CIDP sur la production de noix de coco et les systèmes de semences dans la région du Pacifique, tenues du 7 au 20 avril 2018 à Nadi, Fidji. In: Bourdeix, R. et al., Cocotiers de Polynésie Française. Disponible à l'URL: https://cocotierpolynesie.blogspot.com/

Citation de la version anglaise: Bourdeix, R., Hussein N., and Dore, D. (2018) Technical recommendations from the CIDP meeting on Coconut Production and Seeds Systems in the Pacific Region held from 7 to 20 April 2018 in Nadi, Fiji. In: Bourdeix, R., Labouisse, J.P., Mapusua, K., Ollivier, J. and Kumar, V. (2018). Coconut planting material for the Pacific Region. Available at the URL: https://replantcoconut.blogspot.com. Seen on 09/11/2018.

Coupures de presse (missions antérieures à 2019)






o


Ecotourime: planter des cocotiers... la tête en bas!



Un guide touristique de l'île de Moorea, en Polynésie Française, a eu l'idée saugrenue mais très originale de planter des cocotiers à l'envers... Ou plus exactement de planter des troncs de cocotier avec les racines en haut! 

Une alternative serait de sculpter un visage "Rasta" dans la partie située juste sous les racines, faisant apparaître ces dernières comme des "dreadlocks"


Cliquez sur les photos pour les agrandir...





A la recherche des variétés perdues....

Par R. Bourdeix, 2009

Juste dans le cas où l'aventure tenterait des randonneurs - Si vous avez plus de succès que moi, faites le moi savoir!

M. Widric GANDOUIN a signalé avoir vu à Tahiti des cocotiers portant des fruits de très grosse taille, mais nous n'avons pas pu vérifier l'information. "J'avais remonté sur 3 ou 4 km la rivière située en fond de vallée située au pk 25.8 à Tiarei, Côte Est, derrière la propriété de Monsieur Gaston SAUVOT à qui il faut demander, pour la forme et de ma part si vous le souhaitez, la permission d’accès. Après une grande cascade de départ (+15 min) et différents sauts (+ 40 min) puis une gorge avec un petite escalade (niv + 3 m sans équipement) vous arrivez à un point de rivière plus calme avec des plats rocheux sinueux où visiblement des populations ont vécu, les cocotiers sont en lisière sur la droite."
Le dimanche 22 février 2009, j'ai essayé de retrouver les cocotiers cités par M. Widric Gandouin. Je suis parti en stop car impossible de trouver une voiture à louer à cause du congrès international, 800 chercheurs qui arrivent... il m'a fallu trois voitures pour arriver jusqu'au kilomètre 25.8 (Ils comptent les kilomètres à partir de Papeete).Quelqu'un m'indique la maison de M. Gaston Sauvot, mais cette maison était vide. Un chemin glissant de boue qui monte raide. Je n'ai pas vu de grande cascade. A un moment le chemin s'arrête (photo ci-jointe). Ensuite j'ai essayé de remonter dans le lit de la rivière, mais je suis arrivé à un endroit ou de nombreux arbres étaient tombés dans la rivière et barraient le passage.Au retour, trois voitures pour arriver à la maison d'Arue près du rond point d'Erima. la plus étonnante est reproduite ci-dessous...