|
Variétés présentes sur l'attol de Tetiaroa |
Les variétés polynésiennes traditionelles de cocotiers constituent un « trésor national » fortement menacé de disparition.
Depuis les années 1980, des variétés hybrides de cocotiers sont plantées un peu partout dans le monde. Certains de ces hybrides, très productifs, ont été appréciés par les planteurs. En revanche, leur utilisation intensive menace de disparition les variétés traditionnelles de cocotier. Cette problématique est la même pour toutes les plantes cultivées : bien sur, il faut bien sur utiliser les variétés améliorées qui augmentent le rendement et rentabilisent l’exploitation agricole ; mais cette utilisation doit s’accompagner d’un programme de référencement et de conservation des variétés traditionnelles. En effet ces dernières recèlent des « trésors cachés » qu’il faut absolument conserver pour l’avenir : résistance à des maladies, à la sécheresse, ou encore adaptation à des usages particuliers, propriétés médicinales…
|
Le jaunissement mortel: une menace pour la région Pacifique |
Une grave menace pèse sur la culture du cocotier dans le monde. Cette image vient du Ghana, un pays d’Afrique de l’Ouest. Il s’agit d’une cocoteraie attaquée par le jaunissement mortel, maladie due à un mycoplasme, organisme intermédiaire entre virus et bactérie. Cette maladie fait des ravages non seulement en Afrique, mais dans les Antilles et en Amérique. En l’espace de six mois, elle transforme une cocoteraie saine en champ de poteau télégraphique. Au Ghana, un cocotier Grand originaire du Vanuatu et et un cocotier Nain vert du Sri Lanka sont les seules variétés qui résistent à cette maladie. C’est un excellent exemple de collaboration internationale. Il montre comment une variété de la région Pacifique peut être extrêmement utile loin de sa zone d’origine. Heureusement, cette maladie n’existe pas encore en Polynésie Française. Dans le monde, les dégats causés par la maladie du Jaunissement mortel se chiffrent à plusieurs millions de dollars par an ; la solution viendra en partie des variétés traditionelles qui tolérent la maladie. Et si, au Vanuatu et au Sri Lanka, nous n’avions pas conservé ces variétés?
|
Coco à corne de Tetiaroa |
L’importance du cocotier ne se limite pas au seul secteur agricole. Pour l’environnement, la culture et le tourisme, le cocotier fait partie intégrante du mythe et de l’identité de la Polynésie. Dans un contexte de concurrence exacerbée avec les autres destinations touristiques émergentes du Sud, il importe de se démarquer de l’uniformisation croissante des offres. L’image « cocotier, plage et sable blanc » ne suffit plus. Si les cocotiers sont présents dans les paysages polynésiens, leur potentiel culturel reste insuffisamment exploité. Les cocotiers sont actuellement cantonnés à un rôle d'ambiance végétale, alors qu'ils devraient « raconter des histoires » et mieux illustrer les spécificités culturelles polynésiennes. Aux Seychelles, par exemple, des milliers de touristes se déplacent pour aller voir les célèbres « coco fesse ». Pourquoi en Polynésie, les touristes n’iraient ils pas voir les tout aussi surprenants « cocos à corne » qui existent dans les Tuamotu et à Tetiaroa ?
Actuellement, tout le monde en Polynésie se focalise sur le coprah, qui a encore une importance économique. Pourtant il ne faudrait pas que ce cocotier « industriel et capitaliste », qui dure seulement depuis 120 ans, fasse oublier le cocotier culturel, polynésien et traditionel, dont certaines variétés ont été patiemment sélectionnées pendant 1000 à 2000 ans par les anciens polynésiens. En fait, de 1800 à 1930, le nombre de cocotier en Polynésie Française a été multiplié par 40 ou 50. Les gens ont planté absolument partout des cocotiers à coprah, au détriment de la biodiversité et de la végétation endémique. Les variétés traditionelles de cocotier se sont alors diluées dans la masse énorme des cocotiers ne servant que pour le coprah. Certaines variétés ont déjà disparu, d’autres sont menacées de disparition.
Depuis 2006, nous essayons de convaincre la Polynésie Française d’organiser un conservatoire des variétés traditionnelles de cocotier. Il faudrait aux scientifiques environ quatre années de travail pour retrouver les anciennes variétés polynésiennes de cocotier, les décrire, les reproduire et organiser de façon rationnelle leur conservation.